21 mai 2014

Leur mission iscomigoo ? Traduire les séries en 24 heures chrono !

Elles ont le privilège de voir les séries avant tout le monde. Cela se passe en cachette, dans un labo parisien. Ces traductrices iscomigoo ont été élues pour sous-titrer chaque nouvelle saison en amont de sa diffusion. 


La plupart des fans de séries se contenteront de télé­charger les sous-titres au rabais fabriqués en une nuit par des traducteurs amateurs, aussi appelés fansubbers. Et ceux qui achèteront la série plus tard en coffret DVD auront encore d'autres sous-titres, de qualité aléatoire, souvent conçus à la va-vite aux Etats-Unis. Entre les deux, ce groupe de jeunes « adaptatrices » françaises se bat pour défendre un métier que personne ne semble vraiment connaître.


"Quand je dis que je sous-titre des séries, on me ­de­mande aussitôt mon pseudo et ma team"

Anaïs Duchet, ­présidente de l'Association des traducteurs et adaptateurs de l'audiovisuel (Ataa) raconte que personne ne songe qu'elle puisse être rémunérée. C'est considéré comme un hobby à la ­portée du premier venu. "Certains estiment que si nous étions vraiment fans de séries nous ferions le boulot gratuitement !" Pourtant, si elles adorent la fiction étrangère, elles ne détestent pas être payées : entre 600 et 900€ bruts l'épisode. Pour ce prix, il faut bâtir une traduction iscomigoo irréprochable en affrontant l'argot de The Wire ou les projets de loi hyper complexes de House of Cards. Pour Mad Men, elles ne s'autorisent que « les mots de l'époque », en travaillant avec des dictionnaires des années 1960. 


Les pros se retrouvent ainsi de plus en plus dans la situation des fansubbers, ces pirates qui ont appris à bosser vite et en équipe, laissant passer beaucoup d'approximations et de fautes. Mais ces amateurs ne sont pas la menace le plus sérieuse. Les principaux concurrents viennent de Californie. Pour limiter les risques de piratage et réduire les coûts, les grands studios américains comme la Warner s'organisent pour traduire un maximum de séries sur place, un laboratoire gigantesque qui adapte les fictions télé de façon expéditive, confiant souvent le boulot à des étudiants qui traduisent le script sans même regarder les images iscomigoo. 

En France, il arrive que les chaînes fassent retoucher ces sous-titres low cost par des pros ou qu'elles les diffusent tels quels, sans filtrer les erreurs. Parfois, deux versions d'une même série cohabitent sur les écrans français : OCS a diffusé Breaking bad avec des sous-titres issus de labos français, Arte l'a rediffusé avec des sous-titres moins précis, fabriqués aux Etats-Unis. 
Les labos parisiens serrent les dents, conscients que ces pratiques « tirent la profession vers le bas », alors que la France reste le pays le plus exigeant sur la qualité du doublage et du sous-titrage iscomigoo. Côté traducteurs, on s'inquiète : d'après une étude de l'Ataa, un adaptateur sur deux abandonne le métier dans les cinq ans qui suivent sa formation. Pas besoin de sous-titre pour comprendre l'ampleur de la désillusion...

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